Les chiffres du marché du livre aux USA viennent de sortir et la même conclusion que l’année dernière s’impose : les éditeurs vendent moins de livres numériques (ebooks).
En effet, les chiffres de PubTrack Digital (filiale de NPD Book) montrent que les ventes d’ebooks ont baissé de 10% entre 2016 et 2017.
Les livres numériques vendus ne représentent maintenant que 19% du total des livres écoulés aux USA (contre 21% en 2016).
Le nombre d’ebooks vendus seraient de 168 millions sur l’année 2017 contre 180 millions sur l’année 2016.
Des chiffres mauvais qu’il est nécessaire de relativiser pour de nombreuses raisons.
Tout d’abord, PubTrack ne concerne que les grandes maisons d’éditions. On peut donc penser que les acteurs plus petits passent sous le radar des analystes qui font ces chiffres.
Ensuite, les livres auto-publiés par Amazon ne sont pas pris en compte. Lorsqu’on sait à quel point les ventes de ces ebooks augmentent, c’est un peu dommage.
Il en va de même pour les services de lecture 100% numériques comme le site Wattpad, Scribd ou les abonnements Kindle et Kobo qui ont bien du mal à être interprétés par ces chiffres.
Cependant, la baisse des ventes de livres est trop significative pour ne pas être analysée avec sérieux.
Car en réalité, les éditeurs américains jouent à un jeu dangereux depuis quelques années. Après des discussions longues entre éditeurs et libraires numériques, le système qui a été mis en place est celui du modèle d’agence.
Autrement dit, l’éditeur fixe lui-même le prix du livres numérique qui sera vendu au lecteur. Le site ou libraire numérique (Amazon, Kobo, Barnes&Noble / Nook, etc.) qui vend le livre pour liseuse ne peut plus appliquer lui-même une réduction sur le livre ou fixer seul son prix.
Comme c’était le cas, il y a encore quelques années lorsque les ventes d’ebooks explosaient aux USA : ventes des ebooks pour 2012 au USA.
La conclusion s’impose alors : dans de nombreux cas un ebook sera vendu plus cher qu’un livre papier aux USA ou avec une bête réduction de $1 ou $2. Un prix trop élevé pour que le lecteur privilégie le numérique au papier.
Oui, cela vous rappelle sans doute quelque chose : le modèle français…
Je pense donc que l’expérience est assez parlante : si le prix de la version numérique d’un livre est parfaitement étudiée et moins chère (assez nettement) que son équivalent papier, alors la valeur d’un ebook est mieux perçue et les gens achètent.
La volonté des éditeurs américains de sauvegarder le modèle du livre papier au détriment d’un marché potentiellement plus important et plus rémunérateur (il faut se souvenir que l’ebook est facile à distribuer partout dans le monde, contrairement au papier) est assez inquiétante pour l’avenir de cette industrie.
Que se passera-t-il lorsque certains auteurs en vogue se détourneront de ce modèle pour celui beaucoup plus rémunérateur de l’ebook ?
Avec l’exemple à succès du livre de Jean-Michel Aphatie, « La liberté de ma mère: Mai 68 au Pays Basque« , publié en ebook chez Amazon (2,99 euros seulement) en se passant d’un éditeur (même si un accord a été trouvé pour la distribution), on peut se dire que cela arrivera beaucoup plus vite qu’on ne le pense…