Ceci est une fiction : nous sommes dans un futur proche et les services de lecture illimitée des géants mondiaux du numérique ont gagné la guerre du livre.
Côté littérature, Michel Houellebecq sort d’un silence de 5 ans avec un nouveau roman qui raconte comment Michel, le narrateur, passe son temps sur Prime Vidéo depuis que sa femme l’a quitté pour un culturiste allemand.
Son livre, « Stéroïdes », fait grand bruit. Il n’est pourtant disponible qu’en numérique via un abonnement Kindle illimité. Houellebecq retourne sur les tableaux TV pour pourfendre le modèle social allemand et vendre son livre ou des abonnements Kindle.
Frédéric Beigbeder, dégoûté par l’ebook qu’il qualifie de « truc sans âme et sans odeur », devient animateur TV à plein temps et remplace depuis quelques mois Cyril Hanouna sur France Télévision dans l’émission « Touche pas à ma pub ».
Stephen King, très âgé, n’écrit plus qu’avec son fils Joe Hill. L’ensemble des livres du maître de l’horreur et du suspens a été racheté par Scribd. Il faut s’abonner à ce service de lecture illimitée pour lire leur dernier roman épistolaire dont un chapitre est mis en ligne toutes les deux semaines à grand renfort de publicité Facebook.
Kobo, qui appartient toujours à Rakuten, propose un service de lecture illimitée d’ebooks avec un catalogue centré sur l’Asie. Les livres de Haruki Murakami (prix Nobel de Littérature posthume) ont été retirés de la vente un peu partout dans le monde.
Les romans de Murakami, alors devenus cultes auprès des geeks, apparaissent et disparaissent au compte goutte sur le service de lecture illimitée de Kobo pour créer du buzz sur Instagram grâce à des influenceurs. Les trois derniers livres de l’écrivain (« Haut Bas Gauche Droite », « Konami Code » et « ZQSD ») ne sont d’ailleurs plus disponibles en Français « faute d’un modèle économique cohérent« , d’après un communiqué du fabricant de liseuse.
Amélie Nothomb publie maintenant 5 livres par an. Associée à « Apple Books » depuis le succès de « Stupeur et Tremblements 2 : back to Japan », les romans de l’écrivaine coïncident avec la sortie des nouveaux appareils à la Pomme : Apple TV, Mac, Apple Watch, iPhone et iPad.
Côté business, la morosité est de mise avec un marché du livre français qui a vu sa valeur divisée par 2 en 5 ans.
En Europe, 60% des librairies ont fermé. Celles qui survivent se diversifient dans les arts plastiques avec des ventes de mandalas, de feutres et de papeterie (les carnets du type Moleskine sont toujours populaires, de même que le stylos Bic).
Les bibliothèques françaises sont désertées, mais les mairies les transforment souvent en « musée du livre » pour expliquer aux futures générations comment la lecture a débuté avant l’invention des écrans.
Dijon décide de transformer sa bibliothèque en salle de sport, ce qui occupe médias et intellectuels pendant plusieurs semaines. Franck Ribéry, maire divers-centre de Dijon, assume avec une déclaration postée sur Twitter qui figurera, plus tard, dans les manuels scolaires : « le massacre des arbres ne peut pas être commémoré ».
Les éditeurs de livres ne sont plus que des grands cabinets juridiques qui négocient les ventes des droits des romans qu’ils ont encore en catalogue.
Les ventes se font par enchères aux distributeurs numériques sur un modèle qui a fait ses preuves dans le monde du football et qui vise à maximiser les profits.
Avec le développement des plateformes de VOD, tous les livres de René Barjavel sont adaptés en série. Netflix annonce que l’adaptation de « Ravage » aura droit à une septième et ultime saison, au grand désespoir des fans.
Amazon saute sur cette occasion et négocie les droits pour une série « préquelle de Ravage qui se déroulera dans un passé alternatif et dystopique […] » en cinq saisons et qui sera diffusée en exclusivité sur Prime Vidéo.
La popularité des adaptations de livres en séries TV et l’accès au plus grand nombre des abonnements de lecture illimitée fait que le nombre de lecteurs est en hausse depuis 10 années consécutives en France.
Plus d’un foyer sur deux possède au moins une liseuse pour à peu près 100 millions d’appareils de lecture à encre électronique en circulation dans l’hexagone. (chiffres GfK)
En moyenne, un collégien lit 10 livres par an, contre seulement 3 il y a 10 ans.
Pour faire face à ce besoin de lecture croissant, Apple annonce un iPhone avec écran à encre électronique deux ans après que Samsung ait lancé son smartphone Galaxy Reader S2 avec succès.
En France, la classe politique semble dépassée par l’enchaînement rapide des évènements.
Ainsi, les négociations entamés par le gouvernement pour « créer une Alternative Crédible et Souveraine aux Services de Lecture Illimitée des GAFA – l’ACSSLIG » ont échoué faute d’une entente autour des DRM.
L’Allemagne, qui proposait une solution éprouvée sous la forme d’une alliance avec Tolino, n’a pas été reçue par la commission parlementaire chargée du dossier.
Les grands auteurs qui vendent le plus, fatigués par les modèles économiques vieillissants des éditeurs et les changements de législation tous les trois mois, ont signé des contrats avec les géants d’Internet.
Non seulement ils négocient en direct la publication des œuvres avec les distributeurs (qui sont aussi leurs éditeurs), mais ils vendent en même temps les futurs droits des adaptations télévisuelles de leurs romans.
Depuis la débâcle juridique et politique de 2019 sur l’article 13 de la directive visant à protéger les auteurs et ayants droits, les GAFA se sont alliés rapidement avec les principaux ayants droits européens (et leurs milliers de juristes) pour créer une « entente légale ».
Avec l’aide du « bouclier fiscal de la reine » du Royaume-Uni, devenu paradis fiscal depuis le hard Brexit, un exode massif des artistes a lieu.
Les géants d’Internet hébergent à Liverpool les sociétés d’ayants droits et les artistes qui bénéficient ainsi d’exonérations d’impôts intéressantes et d’une meilleure rémunération.
En échange, les GAFA permettent aux ayants droits de faire la promotion exclusive de leurs d’œuvres sur leurs services : Google, Youtube, etc. Les journaux, radios et chaînes de télévision sont ainsi privées des artistes et d’extraits de leurs œuvres.
Pour tenter d’endiguer la fuite des artistes, les députés européens travaillent sur une loi dite « Loi Houellebecq » qui vise à interdire à un artiste de vendre ses œuvres à des sociétés étrangères.
L’auteur E. L. James devient la première écrivaine milliardaire.
Note de l’auteur : rassurez-vous ce site ne devient pas un blog de SF. Mais j’ai voulu partager avec vous ce petit texte qui ne me semble pas aussi farfelu que cela… N’oubliez pas de laisser un commentaire et de partager cet article s’il vous a plu !
Pas mal en effet, et malheureusement, peut-être prémonitoire….
Merci :)
moi j’adore ma liseuse qui m’a refait lire comme une malade que j’étais dans ma prime jeunesse (mais est on malade parce qu’on lit beaucoup ? lol) je l’adore et quand ma première a été « out » je me suis précipitée pour en acheter une autre !
peut être que ce texte est prémonitoire mais en tous les cas il m’a tout de même fait sourire !
merci pour ce sourire du soir !