Pas facile pour le livre numérique d’exister quand le PDG d’une grande maison d’édition décide de lui taper sur la tête.
On le savait déjà, les éditeurs bloquent le développement du prix numérique. J’ai en parlé il y a un peu moins d’un an dans cet article, et seulement quelques jours dans un petit texte consacré aux éditions J’ai Lu et le numérique.
Aujourd’hui c’est le cas de Hachette Livre qui est intéressant.
Alors que son PDG, Arnaud Nourry, s’est rendu en Inde pour les affaires, il en a profité pour donner une interview assez fournie au journal The Hindu Business Line.
L’homme d’affaire indique surtout se concentré sur le papier. Pour lui, on est pas prêt de voir 50 % de parts de marché pour le livre numérique. Car, même aux USA, le papier compte toujours pour environ 80% des ventes.
Voici les arguments avancés par Arnaud Nourry en faveur du livre papier :
- il est peu cher : forcément c’est l’éditeur qui fixe son prix avec le distributeur
- on peut voyager avec : et on ne peut pas voyager avec un ebook (ou des milliers d’ebooks) sur sa liseuse ou son smartphone ?
- on n’a pas à le brancher
- il sera toujours là 200 ans plus tard car un livre est un livre : mes ebooks aussi si mes enfants continuent d’en faire des copies de sauvegarde – alors que je sais bien que les romans papiers finiront à la poubelle à ma mort.
Comme toujours, Arnaud Nourry ne voit que son monde à lui dans un discours qui ressemble à la méthode coué.
Et, comme chacun sait, la carte n’est pas le territoire.
Un pseudo-éditeur comme Wattpad réalise 100% de son activité sur le numérique et de nombreux auteurs auto-édités ne voient pas de valeur dans le livre papier : trop cher à produire et à distribué, il ne présente que peu d’intérêt pour l’auteur qui souhaite être vu.
Mais ce PDG espère quand même faire quelque chose avec les ebooks : « un livre numérique c’est de l’impression numérique, ce n’est pas un produit très intelligent, il n’y a pas de valeur ajoutée. Nous devons travailler là dessus et trouver un moyen d’attirer l’attention. »
Traduction : il n’est pas question de baisser le prix des livres numériques mais on va essayer de les enrichir pour proposer plus aux lecteurs.
C’est peut-être pour cela que des entreprises comme Amazon tentent de nouvelles choses avec des fonctionnalités comme Kindle In Motion. On a vu cela aussi avec des éditions numériques spéciales de Game of Thrones.
Cependant, le spectre du piratage rode plus que jamais sur cette industrie. En se bornant à rechercher du nouveau là où le prix d’un livre numérique devrait simplement baisser, les éditeurs risquent de scier la branche sur laquelle ils sont assis.
Si en France le piratage d’ebooks reste une démarche assez souterraine, dans d’autres pays comme les Pays-Bas, c’est devenu un enjeu national.
Alors, Arnaud Nourry, peut-être que le temps d’ouvrir les yeux est venu ? Cette année 2018 sera-t-elle celle de la prise de conscience ?